Dortoir n°3 | Il est bon d'avoir quelqu'un à qui parler. | Gwen & Bulle

▬ Gwendoline & Bulle ▬
Il est bon d'avoir quelqu'un à qui parler.

Ce soir-là, Gwendoline rentra un peu plus tard au dortoir que d'habitude. Ses colocataires étaient endormies, elle en était certaine, lorsqu'elle poussa la porte de la grande chambre. Son rendez-vous hebdomadaire avec le principal avait duré un peu plus longtemps que prévu et maintenant elle devait trouver son lit sans allumer la lumière. Elle avança à tâtons dans la pièce et étouffa un cri en marchant sur quelque chose de solide et douloureux. Un lego. La quatrième fille de cette chambre n'avait que sept ans et était arrivée récemment. Visiblement, elle ne savait pas ranger ses jouets... Ravalant son agacement et sa douleur, Gwen finit par atteindre son lit dans l'obscurité et s'écroula sur son matelas sans se changer. Pas le temps, pas l'énergie. Le professeur Dubois lui avait encore une fois longuement parlé de sa relation avec Gabriel, insistant sur le fait que ce n'était pas prudent, qu'ils étaient dangereux l'un pour l'autre. Tout ce qu'elle n'avait pas envie d'entendre, en gros. Elle soupira et fixa le plafond de la chambre aux poutres apparentes. La gamine y avait collé des petites étoiles phosphorescentes et aucune des trois autres filles, Gwen y compris, n'eut le cœur à refuser. Finalement elle trouvait cela agréable.

Durant des heures, la jeune femme tourna dans ses draps, incapable de rattraper le sommeil qui la fuyait. Trop de pensées flottaient dans sa tête, mélangées et indisciplinées. Elle pensait à sa famille qu'elle n'était pas sûre de revoir un jour, au professeur Dubois qui avait été une sorte de père pendant toute sa vie, à Gabriel qui avait peur de la blesser autant qu'elle craignait la même chose envers lui... Tant de complications qu'elle n'aurait pas connues si elle avait été une fille comme les autres. Une fille normale. Elle soupira finalement vers 2h du matin et tourna la tête vers le lit de son amie, Bulle. Doucement, elle tendit la main vers elle et toucha son bras.

« Hé Bulle. Pssssst. » Chuchota-t-elle.

Gwen n'était pas fière de réveiller son amie en pleine nuit de cette façon, mais elle n'avait pas d'autre solution. Elle avait besoin d'en parler. Besoin d'un avis sur la situation. Un autre avis que le sien qui était émotionnellement compromis.

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(c) GHOST

La journée a été longue pour Bulle aussi. Mais fort heureusement elle n'a pas été mise à mal émotionnellement. Non, Bulle a juste eu des cours pénibles et une grosse journée. Comme tous les jeudis, elle s'est levé tôt, a mangé ses céréales préférées, s'est préparée pour aller en cours. Elle a eu de la méditation, des cours de concentration,de yoga, de dessin, puis de chimie...elle n'aime pas, mais pas du tout la chimie. C'est que des produits qui puent et des formules compliquées! et pour finir, le fameux cours pour maitriser ses capacités. "concentre toi, tu vois bien que les proportions ne sont pas bonnes" "il boite un peu ce chat" "Bulle, c'est pas un chat mutant qu'on t'a demandé de dessiner, pourquoi tu lui as mis de longs crocs?"...hum... peut être pour vous manger, prof. Bulle est fatiguée et a besoin de dormir. En plus après les cours elle devait encore réviser l'histoire et faire sa dissertation de philosophie. Vivement les vacances.

Alors Bulle s'est couchée pas trop tard. Elle a mis du temps à s’endormir, tous ses cours se mélangeaient dans sa tête. Mais elle y est parvenu, enfin. Quand Gwen est rentrée, Bulle dormait. Mais le petit cri de son amie l'a sortie un peu de son rêve. Somnolente elle s'est retournée dans son lit et s'est endormie à nouveau.

Elle rêvait qu'elle pouvait voler et qu'elle emmenait son frère en vadrouille au machu picchu à bord d'un deltaplane en papier. Là ils vivaient de grandes aventures. Ils évitaient des pièges et trouvaient un trésor, puis se battaient contre les méchants...d'ailleurs l'un d'entre eux portait le visage d'un de ses ex copains qui s'était avéré être un abruti.

Et c'est en plein combat que la terre a tremblé. La voix de Gwen est apparue et l'a tirée de son sommeil. Toute pâteuse, Bulle s'est retournée vers son amie en répondant d'une voix endormie

"Hum queskispass?"

Gwendoline n'est pas du genre à réveiller son amie. Elle doit avoir un souci. Et Bulle connait bien des problèmes de Gwendoline. Mais à ce moment là, elle est trop endormie pour y songer.

▬ Gwendoline & Bulle ▬
Il est bon d'avoir quelqu'un à qui parler.

Dès que Bulle s'éveilla et lui répondit avec la voix pâteuse d'une personne fatiguée, Gwen se sentit mal et regretta de l'avoir réveillée pour des choses aussi stupides. Mais le mal était fait malheureusement. Elle se mordilla la lèvre et laissa son amie émerger du rêve probablement agréable qu'elle faisait avant qu'elle ne l'en sorte égoïstement. Elle aurait pu attendre le matin pour lui en parler, pendant le petit déjeuner. Son insomnie n'aurait pas du impacter quelqu'un d'autre, ce n'était pas juste de priver ses proches de sommeil de cette manière.

« Désolé... ça aurait sûrement pu attendre demain... » Chuchota-t-elle, mal à l'aise.

Même si son amie était patiente et d'une grande gentillesse, elle aurait pu lui en vouloir pour ça, même si telle que Gwen la connaissait, Bulle allait probablement tout de suite la rassurer et lui demander ce qui n'allait pas. C'était ce grand cœur sociable et plein de douceur que Gwen avait tout de suite adoré chez sa colocataire de dortoir. Bien sûr elle appréciait aussi l'autre fille et la petite nouvelle, mais ce n'était pas pareil qu'avec Bulle. Leur relation était spéciale, unique, heureuse. Lentement, elle se redressa dans son lit pour s'asseoir en tailleur. De toute manière, elle était toute habillée alors elle ne risquait pas d'avoir froid sans sa couette. Elle avait besoin d'être droite pour mieux réfléchir. Non pas que ce soit logique. Gwen ne faisait pas souvent les choses de façon logique. Elle avait ça en commun avec Bulle.

« Le professeur Dubois m'a encore conseillé de quitter Gabriel. » Expliqua-t-elle discrètement.

Il n'était pas question de réveiller les deux autres à cause de ça, alors autant garder le ton bas.

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